Définition
- Maladie rare
- Maladie auto-immune
- Maladie chronique évoluant par poussées
- Maladie systémique : peut atteindre de nombreux organes
- Synonymes : lupus érythémateux aigu disséminé
Épidémiologie
- 1/1000 à 1/3000 habitants
- Entre 30000 et 60000 patients en France
- Prépondérance féminine (9 femmes/1 homme)
- Age de début : surtout entre 15 et 45 ans
Physiopathologie
On ne connaît pas les mécanismes exacts qui déclenchent la maladie mais ils sont probablement multiples et différents d’un patient à l’autre. Il est ainsi possible que sous l’effet initial de certaines infections virales, de l’exposition aux ultraviolets, de l’imprégnation hormonale, de certains médicaments parfois et sous l’effet de certaines prédispositions, des cellules de l’organisme (particulièrement de la peau) puissent libérer des débris provenant de l’intérieur de la cellule, particulièrement des noyaux cellulaires et des phospholipides (constituants de membrane cellulaire). Ce matériel provenant des débris intracellulaires est alors présenté au système immunitaire de l’organisme qui va réagir en activant ses cellules de l’immunité (lymphocytes T et lymphocytes B) amenant à la production d’auto-anticorps (particulièrement antinucléaires et antiphospholipides) qui vont réagir sur le noyau et les phospholipides (membrane) des cellules bloquant potentiellement leurs fonctions.
Dans certains cas, des médicaments prescrits de façon chronique peuvent déclencher une forme particulière de lupus avec des atteintes essentiellement cutanées et articulaires : il s’agit d’un lupus induit, qui peut régresser à l’arrêt du médicament inducteur. De nombreux médicaments peuvent provoquer un lupus induit.
Clinique
Le lupus est une maladie systémique qui peut potentiellement atteindre la plupart des organes. Il y a autant de formes cliniques que de patients. Les atteintes possibles du lupus peuvent être classées en 3 catégories selon leur sévérité (minime, modérée et sévère) ; de cette sévérité dépendra le traitement proposé.
Le plus souvent, ces poussées s’accompagnent d’une altération de l’état général, parfois de fièvre. L’asthénie est un symptôme fréquent, qui peut perdurer entre les poussées.
Atteintes minimes
Par ce terme, on entend les atteintes non viscérales, qui ne mettent pas en jeu le pronostic vital du patient. Il est à noter que ce terme ne prend pas en compte le possible retentissement psychologique de ces atteintes… La majorité des patients présente une forme cutanéo-articulaire du lupus, sans atteinte viscérale associée.
Atteinte cutanéo-muqueuse (80%)
- Photosensibilité
- Erythème malaire ou vespertilio ou masque lupique ou érythème en aile de papillon : érythème maculo-papuleux finement squameux siégeant sur les ailes du nez et les pommettes ; il peut parfois s’étendre aux régions péri-orbitaires, frontale, au décolleté ou à la face dorsale des mains.
- Lupus discoïde : lésions érythémateuses, papulo-squameuses, circonscrites, rondes ou ovalaires, avec évolution atrophique centrale.
- Erosions muqueuse, en particulier buccales ou génitales
- Alopécie
- Phénomène de Raynaud
Atteinte articulaire (90%)
Polyarthralgies distale, symétrique, des petites articulations, touchant préférentiellement les poignets et les mains, d’horaire inflammatoire avec présence d’arthrite dans 75% des cas.
Cette atteinte n’est pas destructrice, les articulations redeviennent normales en période de rémission.
Atteintes modérées
Il s’agit des atteintes viscérales qui ne mettent pas en jeu le pronostic vital ou fonctionnel du patient.
Atteinte des séreuses
- Pleurésie, la plus fréquente
- Péricardite, entrainant exceptionnellement une tamponnade, souvent associée à une pleurésie
- Ascite, plus rare
Atteinte hématologique
- Leucopénie fréquente, portant en particulier sur les lymphocytes
- Anémie, plusieurs mécanismes sont possibles :
- inflammatoire
- anémie hémolytique auto-immune (AHAI)
- microangiopathie thrombotique (rare)
- érythroblastopénie auto-immune (rare)
- Thrombopénie
- thrombopénie modérée (fréquente)
- purpura thrombopénique auto-immun (PTAI)
- Syndrome d’Evans : association d’une AHAI et d’un PTAI
Atteintes sévères
Il s’agit des atteintes viscérales qui peuvent potentiellement mettre en jeu le pronostic vital du patient ou son pronostic fonctionnel (insuffisance rénale terminale par exemple).
Atteinte rénale
L’atteinte rénale est un des principaux facteurs pronostiques du lupus, elle en faisait la gravité et la mortalité avant l’avènement de la corticothérapie. Elle survient le plus souvent dans les premières années de la maladie. Elle est essentielle à dépister car elle est asymptomatique dans les premiers mois d’évolution et sans traitement, elle évolue vers l’insuffisance rénale chronique terminale avec nécessité de dialyse ou de greffe rénale.
Les premiers symptômes qu’il faut s’acharner à rechercher à chaque consultation sont la protéinurie et/ou l’hématurie, avec la réalisation d’une bandelette urinaire.
Parfois, la protéinurie rentre dans le cadre d’un syndrome néphrotique (oedèmes généralisés) pur ou impur (associée à une hématurie ou une HTA) ou d’un syndrome néphritique. L’insuffisance rénale avec altération de la fonction rénale n’intervient que plus tardivement.
En cas de positivité de la bandelette urinaire, il est nécessaire de confirmer ces anomalies par la réalisation d’une protéinurie des 24h et d’un ECBU. Si les anomalies urinaires sont confirmées, on est amené à faire une ponction biopsie rénale afin d’obtenir un diagnostic histologique qui permettra d’adapter le traitement proposé en fonction du type de glomérulonéphrite :
- classe I : normal
- classe II : glomérulonéphrite mésangiale
- classe III : glomérulonéphrite segmentaire et focale
- classe IV : glomérulonéphrite proliférative diffuse (la plus sévère)
- classe V : glomérulonéphrite extra-membraneuse
- classe VI : lésions fibreuses (IRC terminale)
Atteinte neuro-psychiatrique
Les atteintes neurologiques et psychiatriques du lupus ne sont pas spécifiques de la maladie et peuvent prendre des formes très différentes. Il est parfois difficile de rattacher avec certitude ces atteintes au lupus, ce diagnostic doit toujours être porté en fonction du contexte évolutif du lupus et des antécédents du patient.
- épilepsie
- vascularite cérébrale, heureusement exceptionnelle
- myélite transverse
- chorée
- mononeuropathie
- état psychotique
Biologie
Il existe fréquemment un syndrome inflammatoire biologique (élévation de la CRP, accélération de la VS) ainsi que des modifications de la NFS mais qui ne sont pas spécifiques du lupus.
Les paramètres biologiques spécifiques sont immunologiques :
- Présence d’anticorps anti-nucléaires en immunofluorescence (95%)
- spécificité anti-ADNn (test de Farr) : 60 à 80%
- spécificité anti-Sm (30%) : très spécifiques du lupus
- de nombreuses autres spécificités d’AAN peuvent être retrouvées (anti-SSA, anti-RNP…)
- Consommation du complément sérique (CH50)
- Présence d’antiphospholipides
En fonction des perturbations de la NFS ou de la BU, il faut parfois compléter le bilan biologique :
- Protéinurie/24h
- ECBU
- Test de Coombs
- Recherche d’anticorps anti-plaquettes
Examens d’imagerie
Aucun examen d’imagerie n’est à faire de manière systématique ; la prescription dépend des atteintes cliniques (radios des articulations douloureuses, radio de thorax si suspicion de pleurésie, échographie cardiaque en cas de suspicion de péricardite…).
Diagnostic positif
Il repose sur Critères de classification ACR 1982, mis à jour en 1997 ou Critères de classification selon le SLICC.
Évolution
Le lupus est une maladie chronique qui évolue par poussées, entrecoupées de périodes de rémission. En cas de poussée, il faut rechercher un facteur déclenchant : mauvaise observance, photoexposition, grossesse ou prise d’oestrogènes.
Grâce aux progrès thérapeutiques faits au cours du XXè siècle (corticothérapie, immunosuppresseurs), l’espérance de vie des patients lupiques s’est considérablement allongée et les complications au cours de l’évolution de la maladie se sont modifiées. Actuellement, les deux principales causes de morbi-mortalité au cours du lupus sont les complications infectieuses et les complications cardiovasculaires ; ceci est dû à la fois aux traitements utilisés mais aussi au lupus lui-même qui confère une certaine immunosuppression et qui constitue un facteur de risque cardiovasculaire à part entière.
Le lupus s’associe fréquemment à d’autres maladies auto-immunes, en particulier le syndrome des antiphospholopides (15%) ou le syndrome de Gougerot-Sjögren (15%).
Traitements
Traitements médicamenteux de fond
- Hydroxychloroquine (Plaquénil®) voire Chloroquine :
C’est probablement le traitement le plus important du lupus car il permet de contrôler la maladie au long cours. Il met 6 à 8 semaines à agir à partir de sa prescription. Il est le plus souvent bien toléré à long terme à condition de respecter une surveillance ophtalmologique annuelle.
- Corticothérapie :
Chez certains patients, une corticothérapie à petite dose (≤ 10mg/j) au long cours est nécessaire pour maintenir la rémission.
Traitements médicamenteux des poussées
Le choix du traitement des poussées dépend du type d’atteinte. Les traitements pour chaque organe atteint sont détaillés dans le PNDS actualisé.
Traitements non médicamenteux
Ils jouent un rôle particulièrement important au cours du lupus afin de maintenir la rémission.
- Photoprotection
- Contre indication relative des oestrogènes
- Arrêt du tabac (peut diminuer l’efficacité du Plaquénil®)
- Contrôle des facteurs de risque cardiovasculaire (surpoids, HTA, dyslipidémie, tabac, diabète)
- Soutien psychologique si nécessaire
- Éducation thérapeutique
- Mise en ALD